Transposition de la directive européenne sur les travailleurs de plateforme – quelles conséquences pour les indépendants ?

Melissa

8/4/2025

Contexte et objectifs de la directive

En mars 2024, le Parlement européen a adopté la directive sur les conditions de travail des travailleurs de plateforme. Son principal objectif est de mieux encadrer les relations entre plateformes numériques (VTC, livraison, freelance en ligne…) et travailleurs qui y exercent une activité indépendante. La France a jusqu’au printemps 2025 pour transposer ce texte en droit national, avec pour ambition de reconnaître les spécificités du travail « gig » tout en garantissant des droits essentiels (transparence des algorithmes, accès à la formation, respect des temps de repos…).

Principales mesures transposées début 2025
  1. Requalification automatique en salarié ?

    • Si la plateforme exerce un contrôle significatif sur le prix, l’emploi du temps ou l’exécution des tâches, le statut doit être requalifié en contrat de travail.

    • En pratique, seules 10 % des situations « à risque » ont été requalifiées de janvier à juin 2025, essentiellement chez les plateformes de VTC, là où le degré de contrôle est le plus important.

  2. Obligation de transparence algorithmique

    • Les plateformes doivent désormais communiquer aux travailleurs – sur demande – la logique et les critères majeurs de leur algorithme d’attribution de missions ou de tarification.

    • Les travailleurs disposent d’un droit à l’explication quand une sanction (gel de compte, suspension) est prise, ce qui permet de contester plus efficacement les décisions.

  3. Accès à la formation et au dialogue social

    • Les travailleurs de plateforme peuvent s’inscrire gratuitement à un compte formation dédié financé par une contribution spécifique des plateformes (0,3 % du chiffre d’affaires).

    • La mise en place de comités consultatifs locaux, associant représentants des plateformes et élus syndicaux, garantit un canal de négociation sur les améliorations des conditions de travail.

Impacts et premiers retours
  • Pour les travailleurs :

    • Sentiment accru de reconnaissance : la transparence algorithmique et l’accès facilité à la formation renforcent l’autonomie et la montée en compétences.

    • Faible requalification : la plupart demeurent en statut d’indépendant, mais mieux protégés.

  • Pour les plateformes :

    • Adaptation des systèmes : lourdeur initiale pour développer des interfaces de « droit à l’explication ».

    • Hausse des contributions formation : certains ajustements de leur modèle économique sont nécessaires, mais ils y voient un moyen de fidéliser leurs « partenaires ».

Que retenir ?

La transposition de la directive plateforme en France marque une première étape vers une meilleure régulation du « gig ». Si la requalification automatique reste limitée, les droits nouveaux — formation, transparence, comité consultatif — offrent un cadre plus protecteur. Les prochains mois permettront de mesurer l’efficacité réelle de ces dispositifs et d’ajuster la loi pour éviter à la fois l’excès de précarité et la remise en question du modèle indépendant.